Langage sensible commun

est un projet de création en immersion au sein d’une Maison d’Accueil Spécialisée pensé pour ce lieu et autour de ses usagers (adultes polyhandicapés, personnels soignants et administratifs). Il déploie plusieurs outils et process artistiques au premier lieu desquels se trouve la résidence des artistes engagés. Vivants au sein du lieu, partageant et bousculant le quotidien de ses habitants (tout autant que bousculés par lui). Cet engagement et ce partage sont les garants de la pertinence de l’action. La création est faite in-situ, les dispositifs élaborés en amont forment une architecture perméable influencée par les rencontres, aléas, inspirations sensibles vécues au cours de la résidence. Au delà des déclinaisons plastiques, sonores, performatives, les liens font œuvres.

La première condition d’expérience sensible déployée par les artistes mobilise le procédé de la camera obscura porté ici à l’échelle de la chambre des résidents, dispositif au potentiel éprouvé par de nombreuses réalisations du collectif. Dans l’obscurité l’image du paysage extérieur se voit projetée en couleur dans une inversion haut-bas, droite-gauche, sur toutes les surfaces de la pièce. Un écran placé en face de l’orifice seule source de lumière naturelle, permet au résident de profiter d’une partie choisie de l’image, plus nette et souffrant d’un minimum de déformation. Ces apparitions progressives, émergeant de l’obscurité, l’intimité et la lenteur du procédé sont les conditions propices et nécessaires à une expérience sensible de l’image ainsi qu’à son partage. L’étrangeté et le décrochement poétique, l’invasion de l’extérieur qui vient se mêler à un intérieur sur-investit (invasion déjà instiguée par l’arrivée des artistes), se voit maximisée par l’installation d’éléments et objets physiques venant de l’extérieur et mis en scène dans la pièce en échos avec les images projetées.

Cette performance dans son ensemble, le résident, l’entièreté du dispositif visible fait alors l’objet d’une photographie (prise pendant le processus), première tentative et support d’une traduction sensible de l’expérience vécue.

Tout au long de l’apparition de l’image dans la chambre noire une captation sonore est effectuée, produisant un autre support d’interprétation.

Il s’agira alors dans un deuxième temps, de produire une graphie, placé devant la photographie et à l’écoute de la captation, tentative de traduction, d’interprétation sensible des ressentis témoignés par le résident. On embrasse ici la singularité de ce public, singularité dans son rapport aux espaces qu’il habite, corps et chambres subis, singularité aussi pour nombre d’entre eux dans leurs facultés d’échanges et de témoignage. Un langage parfois individuel, limité, empêché, gestes, sons regards et respirations, invariablement interprété, tributaire de l’attention, de la patience et de la sensibilité de l’interlocuteur.

Dans cette tentative et recherche de transformation de manifestations sonores et sensibles en écrits, seront mobilisés des travaux variés de poètes de musiciens ou de musicologues ainsi que des formes originales (partitions graphiques, calligrammes, idéogrammes…)

Collaborateurs

Ce projet prend corps grâce à la collaboration du collectif Ohmart et de la Maison d’Accueil Spécialisée (MAS) Violette Germain (dépendant du groupe UGECAM Rhône-Alpes), lieu de vie de 50 adultes polyhandicapés hommes ou femmes, relevant d’une prise en charge médico-sociale lourde associant des soins médicaux, de confort et un accompagnement personnalisé.

Artistes

Sarah Mulot
Marin Lereuil